Le loyer de la Mef fait grincer des dents (article Aisne Nouvelle)
source : http://www.aisnenouvelle.fr/index.php/cms/13/article/497551/Le_loyer_de_la_Mef_fait_grincer_des_dents
La Maison de l’emploi du Saint-Quentinois verse, chaque année, à son bailleur privé un loyer conséquent qui grèverait son budget.
Qui paiera le loyer de la Maison de l’emploi et de la formation (Mef) du Saint-Quentinois en 2011 ? La structure elle-même ou bien est-ce qu’une partie de ces dépenses locatives sera répartie sur sa consœur du Vermandois ?
C’est la question que l’on se pose du côté de Bohain puisque les Mef du Vermandois et du Saint-Quentinois fusionneront au 1er janvier, érigeant Pierre André à la présidence de la nouvelle entité.
Saint-Quentin 162 000 €, Bohain 0 €
D’un côté, la Mef du Saint-Quentinois possède un loyer largement au-dessus de la moyenne alors que, de l’autre, celle du Vermandois siège dans des locaux qui lui sont prêtés gracieusement par la communauté de communes. La première dépense ainsi 162 000 € à l’année quand la seconde ne débourse pas un centime.
« Le problème qui se pose dorénavant est de savoir si cette fusion entraînera un budget commun », s’interrogeait, il y a quelques semaines, Jean-Louis Bricout, conseiller régional et maire de Bohain. Si c’était le cas, la Mef du Vermandois en pâtirait puisqu’elle participerait à l’effort locatif de la nouvelle structure alors même que son site n’a pas de dépense locative à assurer.
Au cabinet de Pierre André, on se veut rassurant en affirmant que « le loyer continuera d’être payé par le site saint-quentinois », laissant entrevoir que les finances du site bohainois n’en pâtiraient pas. Reste qu’à Bohain, la situation semble nettement plus flou : « C’est la question que je me pose encore, pointe Marie-Hélène Jeanjean, présidente de la Mef du Vermandois. Mais, le Vermandois n’a pas à payer ça sachant que notre Mef est financée par la communauté de communes. [… Si cela devait arriver,] il faudra aller chercher des fonds complémentaires… »
Un loyer qui représente près de 1/5e du budget
Une chose est sûre. Le bail signé par la Maison de l’emploi du Saint-Quentinois ne semble pas lui être favorable. La note étant particulièrement salée puisque c’est près d’un cinquième de son budget* (qui s’élève à 909 000 €) qui part dans le financement des locaux.
« Effectivement, c’est élevé. C’est même assez énorme comparé à ailleurs, reconnaît Stéphane Bertrandie, directeur de cabinet de Claude Gewerc à la Région. La moyenne régionale représente habituellement autour des 6 ou 7 % du budget des Mef. Ici on est à 17 % [plutôt 18 % en arrondissant, N.D.L.R.]. Certains agents ont d’ailleurs demandé que le loyer soit ramené à des normes raisonnables. Mais, à Saint-Quentin, on ne s’est pas mis dans une logique de gestion mesurée des loyers… »
Selon Laurent Mauroy, directeur de la Mef du Saint-Quentinois, cette dépense est justifiée. « 18 % ce n’est rien quand vous gérez une activité de services, se justifie-t-il. Ce sont des ratios cohérents. Et puis, dans la région, vous n’avez aucune Maison de l’emploi qui accueille et héberge les acteurs de l’emploi comme nous le faisons. Il y a un parking pour recevoir les personnes. Si vous allez dans les autres Maisons de l’emploi, vous vous garerez dans un champ de betteraves… »
C’est cher le parking, tout de même. D’autant que la Mission locale et le Plie, d’autres « acteurs de l’emploi » situés sur le site de la Mef du Saint-Quentinois (boulevard Cordier), ont un loyer à leur charge indépendant. Or, ces deux entités fusionneront avec la Mef en janvier 2011 portant le loyer de la nouvelle structure aux alentours des 340 000 € si le tarif du bail ne change pas (cf. encadré).
« De l’argent qui serait mieux ailleurs »
« Ce sont des montants choquants, lance Jean-Louis Bricout. Et c’est d’autant plus embêtant quand la dépense va à des privés. C’est de l’argent qui irait mieux ailleurs ! »
Dans la ville du ministre de
l’Emploi et du Travail, certains diront que cela fait mauvais genre. Pourtant, quelque temps après sa nomination à la tête de la cité des Pastels, Xavier Bertrand (encore secrétaire générale de l’UMP à ce moment-là) assumait cette situation, bien qu’il n’ait pas eu de responsabilité particulière dans ce dossier : « Je préfère payer plus cher et voir réuni sur un même site les structures liées à l’emploi plutôt que de voir le contribuable s’y perdre à cause de leur éparpillement dans la Ville. »
En attendant, la direction de la Mef du Saint-Quentinois promet des négociations afin de baisser les tarifs indiqués dans le bail.
*La Mef est essentiellement subventionnée par la Région (18 %), l’Agglo (11 %), la Ville de Saint-Quentin (5,6 %) et l’Etat (50 %) d’après le budget prévisionnel de la Mef du Saint-Quentinois en 2010.
VERS UNE RENEGOCIATION DU LOYER ?
Pour Olivier Tournay, conseiller municipal de l’opposition à Saint-Quentin, le choix fait lors de la réalisation des locaux de la Mef du Saint-Quentinois était le mauvais.
« Je trouve que c’est un cadeau fait aux privés, maugrée l’élu communiste. Que l’on ne nous dise pas qu’il n’y avait pas de locaux publics disponibles à Saint-Quentin. Mais, c’est dans la ligne droite de ce qui a été fait ces derniers temps par la mairie. Elle pense que cela ne fait pas partie de ses prérogatives et préfère laisser le travail à des gens qu’elle estime davantage compétents. »
Le directeur de Flunch est le propriétaire
Consciente que l’argent serait bien plus utile ailleurs que dans le loyer, la Maison de l’emploi et de la formation du Saint-Quentinois a décidé de renégocier le bail avec un loyer à la baisse. « C’est en bonne voie, nous dit-on. On a rencontré le bailleur il y a une dizaine de jours. Les discussions se poursuivent. » Une baisse substantielle est-elle envisageable ou sera t-elle minime, voire symbolique ? « Je n’ai pas d’estimation à communiquer pour l’instant », explique Laurent Mauroy invoquant le fait que les négociations ne sont pas terminées.
Pas terminées ? Mais, ont-elles seulement jamais commencé ? Pour le bailleur, contacté hier soir, il semblerait que non. « Je ne sais pas pourquoi M. Mauroy vous a dit cela. Nous n’avons entamé aucune négociation… Le reste, c’est privé. » Nous n’en saurons donc pas plus. Qui dit vrai, qui dit faux ? Difficile de le dire, le secret des négociations pouvant parfois prendre le dessus.
Reste que le bailleur n’est pas un propriétaire de bâtiments lambda. Avant d’être marchand de biens immobiliers, répertorié à Essigny-le-Petit, il est l’un des directeurs de l’enseigne de la célèbre chaîne de restauration Flunch.
De plus, ses liens avec la cité des Pastels ne s’arrêtent d’ailleurs pas là puisque derrière les locaux de la Mission locale, du Plie et vraisemblablement d’autres sites, c’est encore lui. Il en est le propriétaire et les loue aux collectivités publiques. Un marché lucratif ? Peut-être. Ce qui est sûr, c’est que dans ce cas précis, il est financé, en bout de chaîne et grâce aux collectivités territoriales qui le subventionnent, par les contribuables…
LE CHIFFRE :
18
C’est le tarif mensuel de location du m² à la Mef du Saint-Quentinois. La moyenne à Saint-Quentin se situant autour de 7 à 8 € du m² par mois, selon les agences immobilières locales. « Même si de nombreux critères sont à prendre en compte, dans le quartier [de la Mef], les meilleures prestations n’excèdent pas les 10 € par mois, explique-t-on. A 18 €, ça paraît énorme ».
Auteur : Aurélien WALTI
Article paru le : 22 décembre 2010
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